L’apparition de cette notion obligea les analystes sensibles à ce mouvement à se préoccuper de « ce que le patient me fait éprouver » et à différencier cet éprouvé de ce que d’habitude on appelle « contre-transfert » qui est, d’ailleurs, inconscient par nature.
Et, pour mémoire, c’est ce qui, pendant des décennies, fut imposé aux analystes qui avouaient – honteusement, cela va de soi ! – avoir rêvé de leur patient(e) ! Mais l’expression de « contre-identification projective » contient, en elle-même, une notion technique et théorique qui, en son temps, a bouleversé l’édifice servant de socle à la praxis.
Il mène, de ce point de vue, une réflexion à partir du constat que « les interprétations ont souvent pour but de nier l’angoisse qui a surgi chez l’analyste, du fait que la situation lui est inconnue et qu’il la ressent ainsi comme dangereuse » (p. 53).
Ce processus, présent dans toute communication humaine, éclaire de façon novatrice, selon Bion, ce qui se joue, dans l’analyse, entre patient et analyste.
Il observe que l’analyste, s’il parvient à accueillir les identifications projectives de l’analysant sans les évacuer, se trouve confronté à des moments de micro-dépersonnalisation, des moments où il ne se reconnaît pas lui-même, des moments de trouble ou d’effacement de la pensée consciente, qui précèdent l’apparition de points de vue et de sens nouveaux.
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